Pourquoi l’Agence régionale de santé refuse à un village audois l’arrivée d’un rhumatologue
Le maire de Sallèles-d’Aude négociait depuis de nombreux mois avec un spécialiste en rhumatologie, afin qu’il vienne exercer de manière hebdomadaire sur la commune. L’Agence régionale de santé vient d’informer la collectivité qu’elle ne délivrerait pas le numéro "finess" indispensable à tout professionnel de santé, indiquant que le futur centre de santé communal doit se focaliser "en premier lieu" sur les "soins de premier recours" et la "continuité des soins".
Le manque de médecin traitant dans le département, notamment en zone rurale (mais pas que, voir la situation actuelle de Carcassonne), est déjà connu de tous, tout comme le délai pour obtenir un rendez-vous chez de nombreux spécialistes. Dans ce contexte, la commune de Sallèles-d’Aude souhaitait accueillir un rhumatologue : question de "service à la population", affirme le maire Yves Bastié. "Quand on sait le temps qu’il faut pour avoir une consultation si on s’adresse à un spécialiste installé en ville…" Le docteur en question exerce actuellement à Toulouse mais "possède une maison à Sallèles", et il était favorable à des consultations hebdomadaires. "Dans un premier temps chaque mardi, puis nous envisagions de monter à deux ou trois jours par semaine, en vue d’un transfert total de son cabinet à Sallèles." A ce titre, le praticien devait être "embauché comme salarié" par la collectivité.
Preuve que la commune avait bien avancé sur le projet : une date de début d’activité avait été arrêtée. "Le lundi 13 mai", précise Yves Bastié. Le professionnel avait déjà commencé à amener du matériel sur place, et la commune à régler les considérations techniques (paiement par carte bancaire…). Plus encore, pas moins de deux mois de rendez-vous avaient déjà été pris. "Tout le monde était informé de notre démarche depuis le mois de janvier", lance Yves Bastié. Mais voici quelques jours, ce fut la douche froide.
Règles
"L’ARS devait valider l’arrivée de ce spécialiste avec un numéro finess, explique l’élu. Ce numéro est indispensable pour passer convention avec la Caisse primaire d’assurance maladie, et permettre aux patients d’être remboursés. Or l’Agence de santé nous informe que le finess ne nous sera pas délivré car nous devons disposer de médecins généralistes salariés, et non libéraux." Yves Bastié rappelle que sont déjà regroupés en un lieu unique, à Sallèles-d’Aude, deux médecins traitant libéraux, un dermatologue, un orthophoniste ainsi que des infirmières. Le déménagement à proximité des dentistes de la commune est aussi lancé, et l’installation de kinés envisagée. "On se bat pour faire venir des gens d’expérience. Là, nous parvenons à attirer un rhumato, et on nous le refuse", peste l’édile. "On marche vraiment sur la tête dans ce pays !"
Il y a surtout des règles à respecter, rétorque l’Agence de santé, qui a répondu à notre titre via un communiqué synthétisant la situation salléloise. Pour schématiser, il est reproché à la commune d’avoir voulu mettre la charrue avant les bœufs. "La réglementation relative aux centres de santé exige que ces structures d’exercice coordonné dispensent en premier lieu des soins de premier recours, garantissent l’accessibilité et la continuité des soins, ainsi que la coordination des professionnels de santé au sein du centre avec des acteurs de santé", précise-t-on. De fait, "le centre doit fonctionner a minima avec deux professionnels de santé, afin d’assurer la continuité des soins".
Il va falloir recontacter toutes les personnes qui avaient déjà pris rendez-vous en mai et en juin
L’ARS indique ainsi que "le principal obstacle est l’absence de médecin traitant pour y assurer les consultations", ajoutant que "la mairie avait d’abord envisagé de salarier un médecin ayant la spécialité de chirurgien mais, malgré l’appui de l’ARS, il n’a pas souhaité s’engager dans un cursus de changement de spécialité visant à devenir médecin généraliste". Dès lors, l’Agence "ne peut attribuer un numéro finess à ce stade du projet, le fonctionnement avec un unique médecin rhumatologue n’étant pas compatible avec les missions premières d’un centre de santé qui sont d’assurer des soins de premier recours et de garantir la continuité des soins".
Des explications qui ont quand même du mal à passer côté mairie. "Le médecin est catastrophé, et il va falloir recontacter toutes les personnes qui avaient déjà pris rendez-vous en mai et en juin", déplore Yves Bastié, déterminé à saisir "le préfet et la direction régionale de l’ARS". Les représentants audois de cette dernière soulignent toutefois que "la porte reste ouverte" pour Sallèles d’Aude : "L’ARS, particulièrement attentive à la problématique de l’accès aux soins, continue de suivre le dossier avec attention", ajoute-t-on, stipulant le "projet évoqué par la directrice du CCAS de salarier à temps partiel les deux médecins généralistes installés à titre libéral dans la commune".
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